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LE VIGNERON DANS LA VIGNE


petits par les barreaux, jusqu’à ce qu’ils n’aient plus besoin d’elle.

Mon père ne me dit pas ce qu’il pensait de ce moyen.

C’est pourquoi j’installai le nid dans une cage, la cage sur le cerisier et ce que j’avais prévu arriva : les vieux chardonnerets, sans hésiter, apportèrent aux petits des pleins becs de chenilles. Et mon père observait de loin, amusé comme moi, leur va-et-vient fleuri, leur vol teint de rouge sang et de jaune soufre.

Je dis un soir :

— Les petits sont assez drus. S’ils étaient libres, ils s’envoleraient. Qu’ils passent une dernière nuit en famille et demain je les porterai à la maison, je les pendrai à ma fenêtre, et je te prie de croire qu’il n’y aura pas beaucoup de chardonnerets au monde mieux soignés.

Mon père ne me dit pas le contraire.

Le lendemain je trouvai la cage vide. Mon père était là, témoin de ma stupeur.

— Je ne suis pas curieux, dis-je, mais je voudrais bien savoir quel est l’imbécile qui a ouvert la porte de cette cage !