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TABLETTES D'ÉLOI


de Mme Willem. Elle écoute avec ses paupières, sa bouche et ses narines scintillantes, tandis que ses oreilles lointaines ne lui servent à rien. Et elle paraît à Éloi jolie au delà de toute expression poétique. Il achève, triomphal, comme on arrive au haut d’un sommet d’où la vue s’étend si loin que chacun se recueille, cherche ses mots et ne trouve pas.

Et tous se sont dressés debout.

— Tâtez mes mains moites, dit Mme Willem. Plusieurs fois, j’ai failli crier. Ce n’est ni bien, ni très bien, ni quoi que ce soit. C’est beau. Voilà tout.

Le poète Willem se promène dans le cabinet de travail. Il s’agite et parle indirectement :

— Il y a là plus que du talent. Il y a presque… C’est supérieur de cent coudées à ce que j’imaginais. Je le savais incapable d’écrire une ordure. Je me disais : « Ce sera gai, spirituel, habile. » Je ne soupçonnais pas cette qualité d’émotion poignante. Et, avec ça, il lit admirablement. Un autre y