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LE VIGNERON DANS LA VIGNE


— Vous voyez, dit-elle, ce n’est pas la même chose lorsqu’on rit exprès. Il aurait fallu m’entendre au mariage d’un de mes garçons. Mon Dieu ! que j’ai ri ! Mon Dieu ! que j’ai ri !

— Tant que ça, Honorine ? c’est drôle.

— C’est la vérité, dit-elle rassise ; personne n’a peut-être plus pleuré, mais personne n’a peut-être plus ri que moi dans sa vie.

— Recommenceriez-vous votre vie telle quelle ?

— Malheurs et bonheurs compris, avec la permission de Dieu, je recommencerais.

— Implorez-le.

— Je le prie trop mal. Le soir, dans le lit, je m’endors de sommeil au milieu de ma prière. Le matin, je me dépêche d’aller à ma besogne, et je le prie en route, mais je rencontre quelqu’un, je bavarde et ma prière reste à moitié faite.

— Répondez franchement, Honorine : croyez-vous que Dieu existe ?

— Il faut bien ; et vous ?

— Oh ! moi, je n’en sais rien du tout