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à la cime du colombier

— « Tiens ! encore des pas ! Mais montent-ils ou descendent-ils ?… »

— « N’en tenez pas compte », répondit Robert à M. Monbardeau. Ce sont les miens et ceux de Maxime… Vous comprendrez tout à l’heure. Hier nous avons marché dans nos propres trace, de peur de multiplier les voies. »

Ils continuèrent à border la neige, tournant ainsi autour de la croix, qu’ils avaient toujours fort au-dessus d’eux et dont ils ne voyaient que la partie supérieure.

Or, il arriva qu’à force de tourner, ils se retrouvèrent à leur point de départ, vingt minutes après l’avoir quitté, ayant parcouru tout le périmètre de la calotte blanche et sans avoir aperçu la moindre trace descendante.

M. Monbardeau et M. Le Tellier s’écrièrent en même temps :

— « Ils sont restés là-haut ! »

Le reflet de la neige pâlissait encore leur pâleur.

— « Dame, naturellement ! » appuya Tiburce. « Puisqu’ils ne sont pas descendus, c’est qu’ils sont toujours là-haut ! »

M. Le Tellier chancela.

— « Robert, mon ami, pourquoi nous avoir caché… »

— « Montons », dit le secrétaire. « Je vous demande seulement de faire un détour, afin que les trois pistes que voici restent bien isolées et bien nettes. »

La crête du Grand-Colombier n’est rien moins que spacieuse. Sa bande aplatie n’a pas deux mètres de large sur trente de long. M. Monbardeau, qui grimpait avec une sorte de furie, arriva le premier, et demeura muet de saisissement contre le poteau de la croix.

Là où son imagination avait déjà couché les cadavres de son fils, de sa bru et de sa nièce, il n’y avait personne. Il n’y avait rien.

Rien ? Ah ! si !

— « La canne d’Henri ! Sa canne, brisée ! Elle est brisée ! »

— « N’y touchez pas ! » cria de loin Maxime. « C’est essentiel ; n’y touchez pas ! »

— « Mais, les traces ? les traces ?… » demandait