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l’attente et l’arrivée des renforts

elle était montée à la chambre de sa fille avec Mme Arquedouve, et l’une s’ingéniait à retrouver Marie-Thérèse dans la vue de son entourage intime, tandis que l’autre respirait tendrement l’odeur florale qui s’en exhalait.

Quelques visiteurs sonnèrent au portail. Ils laissaient des cartes avec l’expression de leur sympathie. On ne reçut que Mlle de Baradaine, l’unique parente de Fabienne Monbardeau-d’Arvière. Elle épancha le trop plein de son gros cœur dans une tirade prodigieuse d’abondance et de banalité. La consternation générale redoubla.

À quatre heures, M. Le Tellier, en vigie sur la terrasse, d’où il guettait l’arrivée du duc d’Agnès par la voie du ciel ou la voie du sol, — entendit Maxime qui l’appelait à la fenêtre de son laboratoire. Robert se tenait près de lui.

M. Le Tellier courut les rejoindre.

— « Mon ami, mon cher ami ! » dit-il en apercevant son secrétaire accablé de lassitude. « Que je vous suis reconnaissant… » ·

Robert l’arrêta.

— « J’ai passé la nuit et la matinée dans le Colombier, » dit-il, « mais ne me plaignez pas : il n’est tombé qu’une où deux gouttes de pluie à l’endroit où j’étais… Et c’est plus heureux qu’on ne pourrait le supposer. »

— « Vous savez quelque chose ! »

Robert et Maxime s’entre-regardèrent.

— « Oui, papa, il y a du nouveau. Mais nous avons tenu à ce que vous fussiez seul à le savoir ; parce que les autres, s’ils l’apprenaient, n’auraient de cesse qu’une fois renseignés par le menu. Et nous avons la conviction qu’il vaut mieux ne pas décrire ce que Robert a trouvé. »

— « Comment ! comment ! »

— « Oh ! rassurez-vous : sa découverte n’est pas épouvantable ! Loin de là, puisqu’elle met un atout dans notre jeu. Mais nous préférons, Robert et moi, que l’on voie les choses, au lieu d’en écouter la description, afin que chacun puisse se prononcer librement à leur sujet. Vous savez combien le langage le plus neutre est tendancieux ; vous savez comme l’opinion de celui qui parle se trahit, malgré lui, dans le choix des formules. Toute