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nouveau message de tiburce

quand, de sa fenêtre, le duc d’Agnès considérait l’agitation des passants, il croyait voir, à travers les carreaux, une collection poissonneuse dans un aquarium !

— « S’il me restait au moins une toute petite chance ! » fit-il subitement avec un demi-sourire honteux…

M. Le Tellier leva les bras pour les laisser retomber en signe d’impuissance, et le duc d’Agnès reprit en balbutiant :

— « Oui, je sais bien… Il faudrait être fou… aussi fou que… euh ! hem !… que, hem… que Tiburce, par exemple, n’est-ce pas ?… Ah ! celui-là… rien ne le déconcerte… hum… »

Il sortit une lettre d’un geste emprunté.

— « J’ai… hem !… Il m’a envoyé ça. »

— « Ne me faites pas voir cette lettre ; non ! Ah ! je n’y pensais plus guère, à votre Tiburce ! C’est vrai : dire qu’il y a encore un imbécile pour croire à ces bienheureuses chimères… Ah ! l’enviable crétin ! Serrez votre papier, mon ami ; cela me ferait du mal. »

— « Évidemment ! » concéda le duc d’Agnès.

Mais cependant, il relisait pour lui seul le message insensé de Tiburce.

( pièce 845)
Bombay, le 3 aout 1912.

Je conserve bon espoir, cher ami, quoique j’aie contre moi bien des hasards stupides et l’homme le plus habile de la terre : Hatkins.

Tu te rappelles que je me suis embarqué à la poursuite d’un certain révérend Hodgson et de sa fille, que je soupçonnais être Hatkins et Mlle Le Tellier. Je les ai trouvés à Singapour avec une facilité surprenante. C’étaient un vieux pasteur protestant et sa sœur aînée ! L’ostentation qu’ils apportaient à ne pas se cacher m’a vivement révélé le piège ; ces deux vieillards étaient des complices que Hatkins avait fait débarquer en même temps que lui et qui, dès cet instant, avaient pris le nom d’emprunt dont l’Américain et Mlle Le Tellier s’étaient affublés sur le bateau. Pendant que je m’occupais d’eux, Hatkins et sa compagne s’enfuyaient. — Ils s’enfuyaient encore : c’était donc eux, de plus en plus.

Par déduction, je découvre le chemin qu’ils ont pris. Depuis