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le péril bleu

de la Terre… ce grenier de Damoclès… J’étais suprêmement surexcité… Cette idée tournoyait sous mon crâne comme un papillon affolé dans une boîte, — cette idée, sous cette forme puérile et morbide : que certains savants, s’étant donné de l’air, étaient devenus les Sarvants !!! — Mais j’avais beau faire : je sentais bien que j’étais dans un monde naturel. Le mieux, le plus agréable, était de supposer que ses habitants étaient les hommes mêmes qui l’avaient découvert… peut-être des hommes invisibilisés… peut-être visibles autant que moi-même, — et que j’allais les voir, enfin, dans leur château de palissades.

Des palissades. Il me semblait toujours que c’étaient des palissades. Il arrivait, ce château ; je gravissais la côte vers lui. Je gravissais l’invisible montagne, au milieu du vide. J’ascensionnais au-dessus de l’Air maintenant, vers la construction. Je ressentais le besoin de témoigner la joie qui m’envahissait à cause de la personne que je venais rejoindre ici… et dont cette bastille contenait probablement… [Encore des mots biffés.]

Ah ! cette bastille ! elle me ménageait le plus atroce crève-cœur… »

En lisant ces derniers mots, M. Le Tellier ne put se défendre d’une grande émotion. Le cahier rouge trembla dans ses mains comme s’il eût été vivant et sur le point de mourir. La lecture s’acheva sur un couac d’autant plus impressionnant qu’il était un peu risible… Ce que voyant, le duc d’Agnès, — qui écoutait, les sourcils froncés, — s’empara du journal et continua de cette façon :