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le péril bleu

Cependant l’astronome débouchait sur le perron et criait à son fils :

— « Pourquoi n’entres-tu pas, mon petit ? As-tu mal ? Tu aurais dû nous appeler… »

Mais, à la vue de son père, Maxime se dressa, et, de loin, avec une voix et des gestes de catastrophe :

— « N’approchez pas ! » ordonna-t-il. « Au nom de Dieu, restez dans la maison ! »

M. Le Tellier s’arrêta. — Ce n’était pas les Sarvants qui lui faisaient peur, mais son fils. Il le voyait beaucoup mieux que de la fenêtre, étant plus près de lui.

Maxime se tenait debout. Il avait l’air si triste, si triste… Il était hâve, malpropre ; sa veste décousue pendait en loques ; pas de chapeau ; et puis, par-dessus tout, ce faciès égaré que les yeux agrandis d’horreur semblaient envahir… Et tout cela baigné de soleil levant et dans l’aurore d’un retour !

« Maxime est fou ! » pensa M. Le Tellier. « Cette aventure a terminé l’œuvre de folie que l’histoire de la petite Jeantaz avait commencée. L’hérédité aussi… La maman n’a pas le moral bien solide… Maxime est fou ! »

Sans faire une enjambée de plus, pour ne pas le contrarier, il lui adressa des paroles calmantes :

— « C’est entendu ; je ne bougerai pas. Mais alors, viens, viens ! Nous t’attendons. Il ne faut pas rester là… »

Le jeune homme fit un signe désespéré. De grosses larmes coulaient sur ses joues émaciées.

— « Papa ! Je ne peux pas venir ! Je ne peux pas… »

— « Voyons, voyons, mon cher petit, remets-toi… As-tu vu ta sœur, là… où tu étais ?… Et Suzanne ?… Et Henri ?… Fabienne ?… As-tu vu Robert ? »

— « Je n’ai vu que Robert. Et encore ! »

Là-dessus, il se fit dans le château quelque agitation. Tous ceux que Mme Arquedouve avait prévenus sortaient au-devant de Maxime, à peine vêtus, la mine en fête : sa grand’mère, sa mère, son oncle et sa tante, les vieux serviteurs…

Et lui, convulsif, impérieux, désolé, hurlait :

— « N’avancez pas, personne ! Allez-vous-en ! Ren-