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le maître de la lumière

tain. Cherchez bien. Qui ? Cherchez du côté de ceux qui auraient intérêt à tout cela, ou bien qui croient avoir une rancune à satisfaire contre vous, si ce n’est contre ma famille…

— Ma foi, je ne vois personne. Mais, allez, monsieur Charles, croyez-moi, ce n’est pas dans ce sens-là qu’il faut chercher l’explication. Car ce qui se passe n’est pas naturel, et je parierais bien cent francs que vous serez de notre avis tout à l’heure, quand vous aurez vu, de vos yeux…

— À moins que le servant présumé ne me fasse pas l’honneur de m’apparaître !

Le soleil venait de glisser derrière les chaînes bleuies du couchant. La température fraîchit soudain. Le parc s’emplissait d’ombres. Seul, un massif montagneux, assez rapproché, bénéficiait encore des rayons du soir, mais l’ombre en faisait l’ascension comme une marée et la montagne d’or devenait peu à peu une montagne sombre. Bientôt les cimes elles-mêmes, submergées, s’éteignirent. Des chauves-souris commencèrent leur ronde dans le demi-jour crépusculaire.

Péronne et Claude suivirent Charles Christiani qui rentrait dans le salon. Les deux serviteurs, en expectative, attendaient des questions, des ordres…

— Où me faites-vous coucher ? demanda-t-il.

— Je préparerai la chambre que monsieur voudra, dit Péronne.

— Alors, comme d’habitude.

— Bien, monsieur, obtempéra la servante. Monsieur Charles se rend compte ?

— De quoi ? ma bonne, fit-il avec cordialité. De ce que la chambre que j’ai coutume d’habiter avoisine la tour ? De ce que son cabinet de toilette est immédiatement sous la petite chambre haute ? Je vous assure que cela m’est fort égal ! Ah ! je dînerai tôt, pour ne pas manquer l’arrivée du servant ! ajouta-t-il avec un grand rire.

— J’espère que monsieur Charles ne fera pas d’imprudence ! dit Péronne, effarée.

— J’ai idée que les circonstances ne me permettront aucune témérité, répondit-il. Je suis convaincu, mes