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de rectification du cours de la Bièvre, Jean Cartoux, au contraire, ayant fait preuve des qualités requises, passait du provisoire au définitif et prenait rang parmi les trente-deux agents du service de la Sûreté.

« Il était donc inspecteur de la Sûreté à l’époque où Fieschi préparait son attentat.

« Vous vous le rappelez, monsieur, certain complice de Fieschi, le nommé Boireau, avait imprudemment bavardé, la veille de l’événement. La police tenait le renseignement suivant : un attentat doit se produire au cours de la revue, à hauteur de l’Ambigu.

« Or, si le préfet, qui était alors M. Gisquet, avait été mieux servi : si l’un de ses inspecteurs n’avait pas gardé pour lui une indication que cet homme surprit par hasard, M. Gisquet aurait su, primo, que l’Ambigu en question n’était pas le nouvel Ambigu, mais l’ancien : secundo, que l’auteur éventuel de l’attentat était un Corse.

« L’inspecteur dont il s’agit, c’était Jean Cartoux.

« Pourquoi, en se taisant, commit-il une faute de service aussi grave ? Par ambition et par vengeance.

« Il savait, depuis très longtemps, que César Christiani habitait 53, boulevard du Temple. Il surveillait haineusement son ancien capitaine, le corsaire qui l’avait si souvent tenu à fond de cale, les fers aux pieds, et dont il conservait un souvenir indéfectible, sous forme de zébrures dans le dos. Il le soupçonnait de tous les défauts, de tous les complots, et guettait la première occasion de lui nuire — au besoin de le perdre.

« César Christiani était Corse.

« Le 52 du boulevard du Temple se trouvait à la hauteur de l’ancien Ambigu.

« Donc, pour Jean Cartoux, l’homme désigné par la dénonciation c’était César Christiani.

« Tout le monde craignait un attentat légitimiste. À d’autres ! Jean Cartoux, lui, fut convaincu qu’il s’agissait d’un attentat impérialiste. Car il était sûr que le conspirateur s’appelait César Christiani, et il savait bien que César Christiani ne pouvait être que bonapartiste. Si surprenant que cela fût, le vieux serviteur de Napoléon devait entretenir des relations secrètes avec le ne-