teur. Or, chaque génération d’automobiles s’en est dépouillée davantage. Une à une, presque toutes ces poignées ont disparu qui exigeaient l’intervention incessante et multiple de l’homme. De nos jours, avec ses organes devenus automatiques, le mécanisme règle le mécanisme. Tout chauffeur n’est plus qu’un pilote ; une fois en action, sa monture entretient d’elle-même son entrain ; éveillée, elle ne se rendormira que sur un commandement. Bref, comme Lerne me le fit remarquer, l’automobile moderne jouit, en somme, des propriétés que lui conférerait une moelle épinière : elle jouit d’un instinct et de réflexes. Des mouvements spontanés s’y produisent, à côté des mouvements volontaires provoqués par l’intelligence du conducteur, lequel devient, pour ainsi dire, le cerveau du véhicule. C’est de cette intelligence que partent les ordres des manœuvres voulues, transmis par les nerfs métalliques aux muscles d’acier.
— D’ailleurs, ajouta mon oncle, entre cette voiture et le corps d’un vertébré, la ressemblance est frappante.
Ici, Lerne réintégrait son domaine. Je prêtai l’oreille. Il poursuivit :
» Nous avons déjà les systèmes nerveux et musculaire, représentés par les tringles de commande, les transmissions et les pièces d’effort. Mais le châssis, Nicolas, qu’est-ce donc, sinon le squelette où les tenons viennent s’insérer comme des tendons ?… Un sang de pétrole, élément vital, circule dans ces artères