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le docteur lerne, sous-dieu

À d’autres, mon oncle, à d’autres ! J’avais commencé à tenir grands ouverts ces yeux que vous m’ordonniez de fermer et je vis alors que ce blâme, votre physionomie satisfaite le démentait.

Nous arrivions, en côtoyant les falaises, à l’extrémité du parc, en face du château qu’on apercevait de là tendant vers nous ses deux corps latéraux et dominant la brousse de son délabrement.

Et c’est à cette minute exacte que mon regard fut attiré par l’oiseau anormal : un pigeon, qui décrivait des ronds à tire-d’aile et, sur des cercles sans cesse rétrécis, précipitait son vol vertigineusement.

— Vois donc ces roses par terre, à cette longue tige de ronce : jolies et intéressantes, dit mon oncle. Sans culture, elles sont redevenues églantines…

— Quel singulier pigeon ! remarquai-je.

— Regarde donc ces fleurs, insista Lerne.

— On dirait qu’il a dans la tête un grain de plomb… Cela se produit quelquefois à la chasse. Il montera, montera, et succombera le plus haut possible.

— Si tu ne surveilles pas tes pieds, tu vas trébucher dans les épines. Casse-cou, mon ami !

Cet avertissement serviable avait été grogné d’un ton menaçant tout à fait hors de saison.

Là-dessus, l’oiseau atteignit le centre de sa spirale et se mit non pas à monter, mais à descendre avec de folles culbutes, en tourbillonnant sur lui-même. Il vint frap-