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le docteur lerne, sous-dieu

ce n’est pas à cause d’Emma ! Certes, la péronnelle m’a fait de la « paine ». Mais cela se dissipera ; et admettre d’un chagrin qu’il soit consolable, c’est en être déjà consolé. — Mon grand malheur vient des souvenirs. Ce que j’ai vu et ressenti me harcèle : le fou, Nelly, l’opération, le Minotaure, Moi-Jupiter, et tant d’autres hideurs !… Je crains les prunelles qui me fixent, et je baisse les yeux devant le trou des serrures… Mon malheur vient de là. Mais je redoute aussi une perspective effroyable…

Si tout cela n’était pas fini ? Si la mort de Klotz ne dénouait pas mon histoire ?…

Lui m’est bien égal puisqu’il n’existe plus ; et quand même il viendrait me taquiner sous les traits de Lerne ou d’un auto fantôme, je saurais qu’il ne peut être qu’un rêve ou une hallucination de mes yeux débiles. Lui est mort ! et je m’en soucie peu, je le répète.

Ce sont les trois aides qui m’inquiètent. Où sont-ils ? Que font-ils ? Voilà les questions. Ils possèdent la formule circéenne et doivent s’en servir à leur propre bénéfice pour faire le trafic des personnalités… Malgré sa défaite, Klotz-Lerne avait rencontré plusieurs personnes disposées à subir sa chirurgie maléfique et à troquer leur âme contre celle d’autrui. Les trois Allemands grossissent, chaque jour, le nombre de ces misérables, envieux d’argent, ou de jeunesse, ou de santé. Il y a, de par le monde, insoupçonnés, des hommes et des femmes qui ne sont pas eux-mêmes…