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le docteur lerne, sous-dieu

Que devenait la merveilleuse serre, aux approches des gelées ?… Peut-être réussirais-je à m’y introduire, à la faveur de ce trépas qui avait désemparé les Allemands. J’obliquai de son côté. Mais ce que je vis de loin me fit accélérer la marche. La porte de la serre était ouverte, et une fumée s’en échappait, âcre et fuligineuse, qui s’élevait aussi par des trous de vitrail.

J’entrai.

La rotonde, l’aquarium et la troisième nef présentaient le spectacle de la destruction. On y avait tout saccagé, brisé, incendié. Des tas d’ordures s’amoncelaient au milieu des trois halls ; j’y retrouvai, mêlés, des plantes rompues avec des pots cassés, des morceaux de cristal et des corolles marines, des fleurs souillées contre des bêtes crevées : bref, trois immondes fumiers où le triple palais voyait la fin de ses merveilles agréables, émouvantes ou répulsives. Des chiffons, dans un coin, brûlaient encore ; dans un autre, sur un monticule de cendres, quelques branches — les plus compromettantes — finissaient de se consumer en braises grésillantes. Des os calcinés puaient à l’envi.

Assurément les aides s’étaient livrés à ce pillage pour anéantir tout vestige de leurs travaux, et l’orage seul m’avait empêché de les entendre. Mais ils n’avaient pas dû s’arrêter en si beau chemin…

Pour m’en assurer, je visitai le charnier de la falaise. Il n’y avait là, dans une fosse béante, que des