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le docteur lerne, sous-dieu

Mon oncle, tourné vers la jeune femme, lui parlait tristement :

— Fallait-il que tu le chérisses, pour l’aimer encore dans une pareille déchéance !… Ma pauvre Emma ! je suis donc bien peu aimable qu’on me préfère de telles ruines !

Emma pleurait dans ses mains.

— Faut-il qu’elle l’aime, — répéta Lerne en regardant tour à tour la pécheresse, l’agonisant et moi, — faut-il qu’elle l’aime !…

Depuis quelques instants, je me livrais à des façons d’entrechats et des manières de vocalises, destinés à traduire ma pensée. Mon oncle suivait la sienne. Sans remarquer autrement que son front orageux devait abriter quelque houleux conciliabule d’intérêts et passions en conflit, dominé par l’imminence d’une catastrophe qu’il pouvait conjurer, je redoublai mes objurgations.

— Oui, je conçois ton désir, Nicolas, fit mon oncle. Tu rendrais volontiers ton cerveau à son enveloppe primitive, ce qui la sauverait puisque tu as mis hors d’état de servir celui de Jupiter… Eh bien, soit !

— Sauvez-le ! sauvez-le ! suppliait la maîtresse adultère qui n’avait saisi que ce terme-là. Sauvez-le ! je vous jure, Frédéric, je vous jure de ne plus le revoir jamais !…

— Assez ! dit Lerne. Il faudra l’aimer de toutes tes