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le docteur lerne, sous-dieu

Ce fut en divaguant de la sorte que, sous l’influence du narcotique, irrémissiblement condamné à mort ou voué à la folie, je m’endormis d’un sommeil écrasant et artificiel qui dura jusqu’au matin.


Quelqu’un me toucha l’épaule.

Lerne, en blouse blanche, était debout près du lit.

Mon sentiment du coupe-gorge renaquit, instantané, limpide et complet.

— Quelle heure est-il ? Vais-je mourir ?… Ou bien votre besogne est-elle finie ?

— Patience, mon neveu ! rien n’est commencé.

— Qu’allez-vous faire de moi ? Est-ce que vous allez m’inoculer la peste ?… la tuberculose ?… le choléra ?… Dites, mon oncle ?… Non ? Alors quoi ?

— Allons, pas d’enfantillages ! dit-il.

Et s’étant effacé, il démasqua une table opératoire qui, juchant sur des tréteaux étroits une façon de claie en grillage, avait l’air d’un chevalet de question. L’attirail des instruments, l’appareil des bocaux luisaient au soleil levant. L’ouate hydrophile posait sur un guéridon sa nuée laineuse. Les deux sphères nickelées, au bout de leurs supports, bombaient des casques de scaphandre : un réchaud brûlait sous chacune d’elles.

Ma stupeur confinait à l’évanouissement.

À côté, derrière le rideau cette fois tendu et frisson-