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le docteur lerne, sous-dieu

chaque instant, ravi de l’excellente farce. Je me retournai du côté de la muraille, et cela fut cause que je découvris une inscription gravée en lettres difformes au vernis du carrelage, à l’aide — c’est du moins ma pensée — d’un chaton de bague :

good bye for evermore, dear father. doniphan.

Adieu pour toujours, cher père. Doniphan. — Malheureux ! On l’avait aussi couché sur ce lit… Klotz également… Et qui prouvait que mon oncle n’eût fait que ces deux victimes avant moi ?… Mais je m’en souciais si peu, si peu…

Le jour baissa.

Il y avait des allées et venues précipitées au-dessus de nous. Le soir les fit ralentir, et cesser. Puis Karl, revenu de Grey-l’Abbaye, releva Johann de sa faction.

Presque aussitôt, Lerne me fit plonger dans un bain et m’ingurgita de force un breuvage amer. Je reconnus le sulfate de magnésie. Plus de doute : on allait me charcuter ; c’étaient là les prémices d’une opération ; nul ne l’ignore plus en ce siècle de l’Appendicite. Ce serait pour le lendemain matin… Qu’allait-on essayer sur mon corps avant de l’achever ?…

Seul avec Karl.

J’avais faim. — Non loin de moi, la misérable basse-cour faisait son murmure : susurrement de paille remuée, caquets peureux, aboiements retenus. — Les bestiaux mugissaient.