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le docteur lerne, sous-dieu

dans une peau bicolore : la dépouille de Pasiphaé…

Un relent fétide m’emplit la gorge. Épuisé, je m’appuyai sur ma pioche immonde, au milieu du charnier. La sueur dont je ruisselais me piqua les prunelles. Je soufflai.

Et dans ce temps-là, mes regards se posèrent au hasard sur un crâne de chat. Aussitôt je le ramassai. Une vraie tête de pipe ! c’est-à-dire qu’un grand trou circulaire le décalottait… J’en pris un autre — de lapin, si j’ai bon souvenir — : même singularité ; quatre, six, quinze autres : tous les crânes évidaient leur boîte béante, avec quelque diversité dans la disposition de l’ouverture. De-ci de-là, des couvercles osseux jonchaient la clairière de leurs coupes vastes ou minimes, profondes ou plates. On aurait dit que toutes ces bêtes avaient été assommées à l’emporte-pièce, dans une hécatombe exacte, un sacrifice raisonné…

Et soudain, une idée ! une idée atroce !

Je m’accroupis sur le mort, et j’achevai de lui débourber la tête. Rien d’anormal par devant ; les cheveux ras. Mais par derrière, enveloppant l’occiput comme la cicatrice de Mac-Bell, d’une tempe à l’autre, une horrible coupure exposait le crâne fendu…

Lerne avait tué Klotz !… Il l’avait supprimé, à cause d’Emma, de la même façon qu’il biffait de la vie bestiaux et volailles quand il avait épuisé en eux la force d’endurer ses expériences ! C’était le crime chirurgical. Je me figurai le mystère percé de part en part.