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le docteur lerne, sous-dieu

Mais, en définitive, qu’importe à l’homme[1] cette question de personnalité in extremis ? et que servirait aux automobiles impérissables, dont il oriente, comme un démiurge, le développement de l’individu et l’évolution de l’espèce, de garder une identité fastidieuse à travers les phases de leur réforme ? Voilà bien des sornettes ! En seraient-ils plus admirables, ces colosses de fer déjà presque vivants ?

» Je te le dis, Nicolas, si l’automobile, par un miracle, devenait indépendant, l’homme pourrait boucler ses malles. Son ère toucherait à sa fin. Après lui, l’au-

  1. M. Vermont rapporte avec plus de grandiloquence que de fidélité les paroles du Dr Lerne. Ce dernier, si méticuleux dans l’exposé de ses pires divagations, a certainement aperçu et mentionné l’importance que présenterait, en matière de responsabilité, la vérification d’une aussi folle théorie. On l’entend se demander : « Les adultes sont-ils tenus de réparer leurs fautes de jeunesse ? Ont-ils le droit de s’y refuser sous prétexte que c’est un autre qui les a commises ?… Autrement dit : Le roi de France peut-il valablement éconduire les créanciers du duc d’Orléans ?… Les vieilles rancunes sont-elles légitimes ?… La reconnaissance doit-elle s’user avec le temps ?… » Etc… etc… — M. Vermont nous dit qu’il était distrait. Nous le voyons sans peine. Car il est trop coquebin dans l’art d’écrire pour que nous le soupçonnions d’avoir coupé volontairement ce paragraphe, en vue d’alléger un chapitre déjà trop anarchique, où il a bonnement reproduit la confusion réelle de la vie, au lieu de distribuer les choses en cette belle ordonnance dont l’artifice est la gloire de l’historien.

    (Note du transcripteur.)