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le docteur lerne, sous-dieu

— Tu ne m’en veux pas ; c’est l’essentiel. En somme, tu comprends les choses.

Évidemment, Lerne appréhendait de m’avoir froissé et que, résolu au départ à la suite d’une pareille vexation, je ne divulguasse l’existence à Fonval de secrets importants, même sans pouvoir documenter qui de droit sur leur nature. Tout bien pesé, la présence chez lui d’un étranger libre de s’enfuir était pour mon oncle un sujet d’alarmes constantes. Il me semblait qu’à sa place, tenu de recevoir un tiers à cause de sa parenté avec moi, j’eusse préféré, certes, en faire mon complice dans le plus bref délai, pour m’assurer sa discrétion.

« Après tout, me dis-je, pourquoi mon oncle n’y aurait-il pas songé ? Avant la date incertaine — et peut-être illusoire — où Lerne doit m’initier, une longue période tourmentée s’écoulera pour lui à exercer sur moi sa double attention d’analyste et de policier. Si j’allais au devant de ses projets ? Il hâterait sans doute avec joie un enseignement sacré à l’égal d’une confession et qui doit unir le maître et le disciple dans un même complot…

» Je ne vois pas pourquoi il accueillerait mes avances de travers, car, dans les deux occurrences possibles : que Lerne soit ou non de bonne foi lorsqu’il prétend m’initier à son Entreprise, aujourd’hui la situation n’a que deux issues : ou mon départ, gros dès à présent de conséquences révélatrices, ou ma connivence.