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le docteur lerne, sous-dieu

pondit enfin : — « Il est en Allemagne… Nous serons seuls ici pendant tout ce temps, Emma… » Il m’avait pris la taille et me regardait dans le blanc des yeux…

» Je ne pouvais pas m’expliquer la conduite de Lerne qui, soucieux de ma vertu promise, me laissait, sans prévenir, à la merci d’un étranger. — « Comment me trouvez-vous ? » demanda Klotz en me serrant contre lui sans plus de façons.

» Je te l’ai déjà dit, Nicolas, il était grand et vigoureux. Je sentais l’étau de ses muscles et m’y abandonnais sans le vouloir : — « Eh bien ! Emma, reprit Klotz, aimons-nous dès aujourd’hui, car vous ne me verrez plus ! »

» Je ne suis pas peureuse. Entre nous, même, j’ai connu la flatterie des mains qui viennent de tuer ; j’ai subi des possessions pareilles à des assassinats. Mes premiers amants font l’amour comme ils vous larderaient de coups de poignards…, ils pèsent lourd et tapent dur : on est des victimes pour eux ; on ne sait si l’on a plus de frayeur que de plaisir. Ça n’est pas désagréable. Mais tout cela n’est rien. La nuit de Klotz a été formidable. Elle me laisse une impression de viol. J’en garderai toujours l’épouvante et la fatigue.

» Je me réveillai tard dans la matinée. Il n’était plus à côté de moi, et je ne l’ai jamais revu.

» Trois semaines passèrent. Ton oncle n’écrivait pas et son absence se prolongeait.

» Il revint à l’improviste. Je ne le vis même pas