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le docteur lerne, sous-dieu

Quatre poules et un coq, de race vulgaire, menaient toutefois une vie plus alerte et se pavanaient en caquetant sur le sol de béton, qu’ils s’obstinaient à becqueter en vain pour y découvrir la graine et le ver.

Au milieu de l’enceinte, une grille inscrivait un grand carré. C’était le chenil. Devant le front de leurs niches en bataille, des chiens résignés s’y promenaient de long en large, comme ces philosophes savent si bien le faire : affreux barbets roturiers, corneau du braconnier, cabots des concierges et clebs de souteneur, caniches dégénérés et bâtards de limiers, bref toute une meute de roquets propres à rien, qu’à la fidélité. — Ils se promenaient donc, et achevaient ainsi de donner à cette cour l’apparence d’un préau d’hôpital vétérinaire.

C’est ici que la chose s’assombrit.

De toutes ces bêtes, en effet, bien peu semblaient valides. La plupart portaient des bandages, qui sur le dos, qui autour du col, contre la nuque, et surtout à la tête. On n’en voyait guère, à travers les mailles des cellules, qui n’eussent point de linges blancs roulés en bonnets, béguins ou turbans. Et la procession des chiens tristes, burlesquement coiffés de toile, ainsi que des touaregs ou des abbesses, et traînant une pancarte attachée à leur cou, formait la mascarade la plus funèbre. D’autant que les malheureux étaient à peu près tous frappés d’une perclusion. L’un tombait sur le museau à chaque pas ; l’autre boitait ; le troisième bran-