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le docteur lerne, sous-dieu

répétaient sans relâche les trois mêmes notes, exécutant ainsi le carillon de l’Arlésienne ; j’étais gai ; je sifflotai sur cet accompagnement sacré la mélodie profane de l’orchestre, qui, par le fait même de l’assemblage, ressemble à une statuette moderne sur un socle gothique… Vraiment, l’absence de Lerne soulageait ma contrainte perpétuelle : on pouvait songer à des billevesées et l’esprit se livrait aux digressions les plus irréfléchies…

En face du laboratoire, au delà du chemin, il y avait un bois. Je louvoyai pour l’atteindre, ayant dressé mes batteries. Au milieu de ce bois, je possédais un vieil ami, — un sapin ; ses branches rayonnantes s’échelonnaient en escalier tournant ; il dominait de haut les constructions : nul observatoire mieux situé ni plus accessible. J’y avais joué naguère au « matelot dans les vergues » !…

L’arbre m’offrit son perchoir, un peu raccourci mais encore touffu. Aux branches supérieures, un souvenir m’attendait, fait de cordes et de planches pourries : la hune ! Moi qui, jadis, avais feint d’y découvrir continents et archipels — tant de fantaisies vraisemblables —, qui m’aurait dit qu’un jour, je serais là, en vigie, pour des aperçus aussi fabuleusement réels ?

Mon regard plongea.

Comme je l’ai raconté, le laboratoire se composait d’une cour entre deux pavillons.

Celui de gauche était percé de larges baies à son