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le docteur lerne, sous-dieu

— Mon oncle, est-ce que je vous escorterai dans toutes vos pérégrinations, à Nanthel ?

— Assurément non. Pourquoi ?…

— Alors, mon oncle, dans l’aversion des cafés, tavernes et estaminets, je vous prierai de me laisser ici, où je vous attendrai tout aussi bien qu’à la brasserie de Nanthel.

— Mais rien ne t’oblige…

— Premièrement, la fête de Grey me séduit. J’aimerais observer plus longtemps une assemblée de cette sorte : les mœurs d’une race, mon oncle, s’y peignent au vif, et je me sens aujourd’hui l’âme d’un ethnologue…

— Tu te moques, ou c’est une lubie !

— … Deuxièmement, mon oncle, à quel gardien confierons-nous ma voiture ? À l’aubergiste, n’est-ce pas ? au tenancier alcoolique d’un bouge plein de rustres avinés ? Vous ne croyez pas, tout de même, que je vais abandonner pendant neuf heures de pendule un chariot de vingt-cinq mille francs exposé aux facéties d’un village en goguette ! Ah, non ! Je veux pouvoir moi-même surveiller l’automobile !

Mon oncle ne fut pas convaincu de ma sincérité. Il voulut déjouer la petite perfidie que je pouvais avoir tramée de regagner Fonval soit en automobile soit sur une bicyclette empruntée, quitte à m’en revenir à Grey pour cinq heures quatorze. — Et c’était proprement la ruse que j’avais machinée. — Le maudit savant faillit tout renverser.