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L’ORANG


À Aurélien Scholl.


— D’ailleurs, c’est étonnant comme mon mari fait bien l’orang ! dit Mme Bornet.

Les convives de choix, peu nombreux, regardèrent M. Bornet. Intimement traités, ils venaient d’écouter, avec frayeur, les histoires terribles échangées.

— Mais selon moi, avait dit M. Bornet, la plus extraordinaire est le Double assassinat dans la rue Morgue. Edgar Poë l’a composée si savamment que j’ai beau la relire, la relire encore, je ne devine jamais l’orang.

Et le mot n’avait pas semblé forcé.

— Je vous assure, dit Mme Bornet, qu’il l’imite dans la perfection, et la première fois, j’ai dû crier au secours contre lui.

— C’est exact, dit M. Bornet, elle a crié au secours, comme une sotte.

— Vous ne plaisantez pas ? dirent ces dames ; vous faites l’orang, vous, monsieur Bornet ?

— Il n’a pourtant rien de l’orang.

— Si, quelque chose, en observant bien, dans le sourire.