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LE MAÎTRE D’ÉCOLE


Dans la salle sans rideaux chauffée par un soleil d’août, le maître d’école commande soudain d’une voix terrible :

— Petits, dormez !

Lui-même donne l’exemple et fréquemment relève la tête pour voir si tout le monde est couché.

— Veux-tu dormir, toi, là-bas ?

Les petits obéissent. Ils mettent un coude sur la table, posent le front au creux du coude, s’appliquent à fermer les yeux et provoquent le sommeil.

Une main s’agite encore. Une mouche pique une oreille. Un sabot tombe avec bruit. Enfin, immobilisés, les petits dorment.

Le maître d’école quitte alors, comme un loup, sa chaire et passe sous les nez en l’air une tabatière pleine de tabac à priser. Quelques-uns reniflent et s’emplissent seuls. Le maître d’école bourre les autres puis remonte dans sa chaire.

Et bientôt il s’amuse et rit beaucoup, beaucoup, parce que les petits, réveillés, éternuent si vite qu’il n’a pas le temps de crier à chacun d’eux :

— Dieu te bénisse, petit, Dieu te bénisse !

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