Page:Renard - La Lanterne sourde, Coquecigrues,1906.djvu/286

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


LA RENCONTRE


Je vais à mes affaires ; je marche sur le trottoir, rapidement.

Il va à ses affaires ; il arrive sur le trottoir, l’allure pressée.

Et nous nous heurtons soudain, nez à nez ; nous poussons un léger grognement d’excuse ou de mauvaise humeur et nous reculons avec un haut-le-corps, des oscillations.

Il oblique vers sa droite : précisément j’oblique vers ma gauche et nous sommes encore ventre contre ventre.

— Pardon ! dit-il.

— Pardon ! dis-je.

Il biaise à sa gauche ; je biaise à ma droite et de nouveau nos chapeaux se touchent.

— Allons, bon !

— Allons, bon !

Il revient au milieu. J’y suis déjà.

— Cédons-lui, pense-t-il, et il s’immobilise. Mais je m’imagine que si je ne fais aucun mouvement, il passera son chemin, et je ne bouge plus.

— Oh !

— Oh !