TIENNETTE PERDUE
Tiennette sort, s’il lui plaît, va où elle veut, et son innocence la protège. Elle marche vite, ne se promène pas, semble toujours fuir.
Ce matin, comme elle a quitté la maison depuis une heure d’horloge, elle s’arrête et dit :
— Mon Dieu ! je me suis perdue !
Elle regarde, réfléchit, se cherche, troublée.
La campagne disparaît sous la neige. Les arbres en ont plein leurs branches ; on dirait que celui-là s’est vêtu comme un voyageur qui attend la diligence.
Mais Tiennette remarque sur la neige ses propres traces toutes fraîches, et l’idée lui vient de se suivre, pour se retrouver.
Tantôt elle pose doucement ses pieds au creux de ses pas, et si d’autres traces croisent les siennes, elle se baisse et les démêle. Tantôt elle court, hors d’haleine, avec des loups dans le dos.
Quand elle arrive au village et reconnaît sa maison parmi les formes accroupies :
— J’ai dû simplement rentrer, pense-t-elle.
Elle ne se hâte plus. Elle respire, ôte son inquiétude comme un châle trop lourd de ses épaules, pousse la porte et dit, l’esprit calmé :
— J’en étais sûre : me voilà !