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Monsieur. — Étonnant ce vieux chapeau qui reste toujours ! Où est sa tête ? Je ne comprends pas. Que nos invités se trompent de nippes, se volent, mais qu’ils s’arrangent et ne nous laissent pas leur friperie. Qu’est-ce que ce vieux chapeau fait là ?

Madame. — Son histoire est simple : un gentilhomme arrive seul, bien ou mal coiffé ; mais il s’en va en compagnie et, pour ne pas rougir, nu-tête. Marie, quelles sommes vous a-t-on données ?

La bonne. — Madame, le petit blond m’a emprunté quarante sous pour sa voiture.

Madame. — Ah ! vous placez votre argent, ma fille ! Montez vous coucher. (La bonne sort.)

Monsieur. — Le petit blond, oui, le journaliste, un garçon décemment élevé : il déclare qu’il n’a jamais un porte-monnaie dans le monde, parce qu’un portemonnaie fait gros sur la cuisse.

Madame. — La bonne ment. Je parie qu’on lui bourre les poches. C’est autant que nous lui retiendrons sur ses gages. Nous recevons des gens mariés qui savent ce qu’on doit à une domestique.

Monsieur. — Les gens mariés pour de bon ne viendraient pas chez nous.

La bonne, rentrant. — Madame, j’oubliais, les cabinets sont encore bouchés !

Monsieur. — Encore ! Les cochons ! Je te dis qu’ils se retiennent dans la journée, pour nous offrir ça, le soir ! J’ai été obligé d’acheter une perche par économie. À chaque instant, il fallait déranger le plombier. Qu’est-ce que vous voulez, ma pauvre Marie ! Les cabinets ne sauraient passer la nuit