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a déroulé son turban et qu’il s’en est servi comme d’une serviette. Peut-être aussi qu’il couche dedans.

Madame. — J’ai tremblé de le voir se mettre à vendre des pastilles.

Monsieur. — Je t’assure qu’il est attaché à une ambassade, solidement. Continuons : n’est-ce pas à toi qu’appartient ce monsieur qui sentait le cigare éventé ?

Madame. — Si tu parles tabac, je te rappellerai ton marchand de cigarettes toutes faites. C’est sans doute l’associé d’un garçon de café. Il les offrait dans une boîte à Palmers, « moins chères qu’à n’importe quel bureau », disait-il.

Monsieur. — Soit. Mais tu nous as amené ce professeur de piano qui glisse ses cartes-prospectus dans les goussets et les corsages.

Madame. — Et toi, cette veuve qui tâte les hommes en dansant pour se chercher un mari vert ; cette forte dame qui montrait son cancer ; et cette autre, décolletée jusqu’à l’âme, qui nous a demandé s’il n’y avait pas de billard ici. Elle voulait organiser une poule au gibier. Faut-il encore te reprocher ta, femme à poils ? C’est scandaleux : elle cultive, soigneusement, à égale distance de ses deux seins, trois poils énormes. Les messieurs veulent voir, et, pour voir, dansent avec elle. De telle sorte que cette grosse toupie, malgré sa lourdeur, arrive à tourner toute la soirée.

Monsieur. — Tu es dure. Je voudrais que quelqu’un de nos invités nous écoutât dans un coin. À mon tour ! Je note : — Un vieux monsieur, aux moustaches de mastic ; il reconduit et se contente de recon-