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un pied, je me contente d’un à peu près. Mais j’y arriverai, dussé-je rester une journée en chemise.

Jean. — Je me lève plus calme. Mes serviettes seules me préoccupent. J’en ai sept ou huit en train. Dès que l’une d’elles est mouillée, je la rejette. Je ne leur tolère qu’une corne humide. La première m’essuie le front, la seconde le nez, la troisième une joue, et ma tête n’est pas sèche, que j’ai mis toutes mes serviettes hors de service.

Jacques. — Est-ce que tu verses de l’huile sur tes cheveux ?

Jean. — Ils sont naturellement gras.

Jacques. — Tu as de la chance. Je me bats contre mes mèches. Une, entre autres, se révolte. Je la ratisse et l’écrase à me l’enfoncer dans le crâne. Elle se redresse pleine de vie, en fer. Je m’imagine qu’elle va soulever mon chapeau, et je n’oserai plus saluer, par crainte de montrer une horreur.

Jean. — Fais-la scier.

Jacques. — Ainsi que tes moustaches. Enseigne ton procédé.

Jean. — Je les ronge moi-même, avec mes propres dents.

Jacques. — L’aspect de ta lèvre déconcerte. On y remarque un vague pointillé noir, les restes d’une moustache incendiée, la fumée, l’ombre, le regret d’une moustache.

Jean. — Je ne pense que si je mordille, si j’ai comme un laborieux mulot dans la bouche. Enfin, suppose ta mèche domptée.

Jacques. — Je veux sortir. Je descends les escaliers et sur chaque marche je m’arrête. Mes souliers se