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L’AVENTURE DE JEAN LEBRIS
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accablait mon corps, et l’indifférence endormait ma pensée. Il faut que l’éclatement de l’obus m’ait violemment ébranlé, ou, ce qui est fort possible, qu’on m’ait administré quelque substance abrutissante. Car, j’oubliais de vous le dire : les soins les plus attentifs me furent prodigués pendant la route ; une main experte renouvelait mes pansements, on me faisait boire des drogues avec toute la douceur désirable, et mille prévenances m’étaient réservées. Mais personne ne m’adressait la parole, et personne ne parlait dans le wagon. Une présence continuelle veillait auprès de moi, silencieuse et serviable.

» Où m’ont-ils conduit ? Quel était le but de ce voyage interminable ? Je puis certifier, à présent, que c’était une maison perdue dans la forêt. Mais en quelle région de l’Europe centrale ? Je l’ignore et sans doute l’ignorerai toujours.

» Tout à coup, il me parut que je me réveillai. Comprenez-moi : j’avais l’illusion de me réveiller tout à fait, après avoir rêvé le cauchemar de la prairie, de l’obus, de l’ambulance et du voyage.