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MORT AU CHAMP D’HONNEUR
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ment ophtalmologique. Seulement, ils ne me tenaient au courant de rien, et je ne sortais pas !… Il a fallu ce garçon — un serviteur mécontent — qui m’a raconté notre victoire, l’armistice, l’occupation… Nous sommes partis, un soir, lui et moi. Nous sommes restés en wagon de longues, longues heures ; et il m’a laissé au pont de Kehl. « Débrouillez-vous, m’a-t-il dit. Vous êtes à Strasbourg. C’est plein de soldats français. » Je me suis fait reconnaître… Voilà ; c’est curieux, hein ?

— Curieux, dis-je, en vérité.

Mais je ne pensais pas à ce que je disais. Jean venait d’ouvrir les yeux, et j’étais tout à ma surprise. Ah ! ces yeux !…

Qu’on imagine une statue antique animée ; qu’on se représente une belle tête de marbre levant ses lourdes paupières sur le globe uni de ses yeux sans prunelles…

— Quel traitement avez-vous suivi ? demandai-je.

— Pour mes yeux ? — Et il les referma subitement. — Oh ! des pansements, je suppose. Je ne me suis pas rendu compte. On ne me disait rien… J’ai l’impression que