Page:Renard - L’Homme truqué, suivi du Château hanté… - Crès, 1921.djvu/245

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
DANS LA MONTAGNE
241

Ce fut vers midi qu’une voix fleurit la rumeur d’une rose nouvelle et incomparable. Le peintre venait de se restaurer, il fumait sa pipe après avoir siroté une timbale d’excellent café froid additionné de vieux marc. La voix chantait comme si une femme eût fredonné en appuyant son front sur l’épaule de Florent Max. Et quand nous disons « chanter » ou « fredonner », c’est une façon grossière de nous exprimer ; car cette voix, en vérité, ne chantait, ni ne fredonnait, ni ne parlait, ni ne soupirait… On ne sait comment dire. C’était un langage sans mots, intelligible pourtant à l’égal d’un discours de violoncelle, un poème nuancé et subtil qui ne s’adressait pas à la raison… Cette voix avait des qualités sonores extraordinaires. Elle caressait véritablement, ce qui n’était rien en comparaison de la tendresse infinie qu’elle répandait.

Elle s’éloigna, mais, par miracle, Florent Max ne cessa de la suivre parmi les autres voix ; et toujours, si loin qu’elle chantât, il la reconnut dans le chœur où elle n’était, à tout prendre, qu’une voix.