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LES DRAMES DE LA CONSCIENCE

Le mari feint de dormir. La femme lui a dit : " Toi, le chef de famille, tu es un esprit supérieur et tu votes ! " Ça lui suffit. Il ne s’aperçoit pas que : " Tu es un esprit supérieur " signifie : " Il y a une foule de choses que tu n’es pas assez fin pour comprendre ! "

C’est le mépris de la femme pour la pensée de l’homme, qui répond au dédain de l’homme pour l’intelligence de la femme. Cette division, cause première de tant d’autres, sur le plus grave des problèmes, s’appelle tolérance, tolérance familiale qui dissimule quelques petites concessions mutuelles inavouées d’un autre ordre.

Notez que le mari est le plus souvent anticlérical par programme, peut-être député et qu’il a voté la loi néfaste.

A quoi rêve ce mari ?

La femme va à la messe, lui n’y va pas. Pourquoi ? Et pourquoi y va-t-elle toujours, puisqu’il n’y va jamais ? S’agit-il de niaiseries ou de religion ?

Ce mari se croit-il délivré parce qu’il siffle un air d’indifférence ?

Le curé reprendrait une fière attitude s’il disait à la femme : " Vous n’entrerez point dans mon église sans votre mari ! "

C’est d’ailleurs ce qui sera probablement