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L’ŒIL CLAIR


inlassable, au courant de tout, juge averti qui nous jugez, ô grand public, que pensez-vous de notre livre de cette année ?

— Je ne l’ai pas lu.

— Et de nos livres des années précédentes ?

— Je ne les ai pas lus.

— Vous en lisez d’autres ! A notre place, quel livre choisi riez- vous ? Donnez un titre ?

— Ce n’est pas mon affaire.

— Pour une fois, mêlez-vous de ce qui ne vous regarde pas, aidez-nous ! Cette année, par exemple, quel livre vous a causé le plus vif plaisir ?

— Attendez ! Je cherche : je me rappelle un livre d’histoire...

— Notre Académie ne s’occupe que des romans.

— Je ne lis jamais de romans.

— J’en étais sûr. J’ai posé la question à quinze publics pareils à vous, et les quinze publics m’ont répondu la même chose. Personne ne lit plus les romans, du moins ceux des jeunes inconnus. Il faut croire que c’est une vilaine corvée ! Notre " société littéraire " vous l’épargne et, loin de lui en savoir gré, à chaque roman qu’elle vous désigne, vous faites la moue !

— Choisissez un livre qui nous plaise, peut-être le lirons-nous.