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POTACHES

" C’est un gros homme redoutable et ingénieux.

Il a fait construire dans le mur mitoyen une cage de verre d’où il peut surveiller deux études à la fois. Il s’y installe à l’improviste, et, avec l’air d’un Principal responsable, il digère là, une heure ou deux, tandis que les pions vont se promener. Brûlebois le vit avant moi. J’étais sans doute aveuglé par la rage. Surpris, il oublia de parer et reçut à la base du nez le seul coup de poing qui porta. Le sang jaillit, Brûlebois saigne toujours comme un veau ! II fallut encore le mener sous la pompe. Le Principal ne dit rien, tant l’étonnait d’abord l’attitude indifférente du pion. Il se contenta de déplacer Brûlebois et de mettre entre nous plusieurs rangs de pupitres. J’étais honteux et désolé, prêt aux excuses. Nos colères se calmaient d’habitude sous le jet de la pompe. Quand Brûlebois revint, il ne m’adressa ni un sourire ni un regard. Il semblait gelé par l’eau froide. Il s’assit à sa nouvelle place et fit voler, avec une sombre ardeur, les feuilles de son dictionnaire reconquis.

" Aussitôt, je passai au petit Alexandre, qui le passa à Prévôt qui copie toutes ses compositions, qui le passa à Milard averti d’un coup de pied au bas du dos parce qu’il a la teigne, qui le passa à Forenbach le bûcheur, qui le passa à Bouloy, neveu