Page:Renard - L’Œil Clair, 1913.djvu/106

Cette page n’a pas encore été corrigée

LA VISITE DU POÈTE


Le poète vient me voir, ce matin, dans ses habits du dimanche, un complet neuf avec des plis comme des tringles à la veste et au pantalon, un col de chemise en toile, raide pour le moment, un petit nœud de cravate noir, un chapeau de paille qu’il tournera entre ses doigts, comme s’il achevait de le tresser. On devine que le ruban de ce chapeau était violet.

Il dépose par terre un panier fermé.

— Je ne sais pas, dit-il, si vous aimez les modestes produits de nos campagnes ?

— Beaucoup.

— Voilà quelques fruits et du laitage.

Je ne verrai que plus tard que ces fruits sont de belles poires, et ce laitage du beurre frais bien battu, car je n’ose pas, craignant (pourquoi ?) quelque surprise, ouvrir le panier. Je le regarde à peine, et