Page:Renard - L’Écornifleur, Ollendorff, 1892.djvu/90

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Ils attendent qu’elle répète encore les noms. Nous nous apitoyons sur leur sort. Leur hâle et leurs yeux sanglants m’ont frappé, et je crée en moi-même un type de marin supérieur, amant de la mer, épris du péril et du rêve, sentimental et sauvage, que je confonds maladroitement avec le père Cruz.

Je l’admire avec effroi ; je voudrais soulever son crâne, pour voir à nu les impressions qu’ont laissées là les éléments en lutte, les spectacles grandioses. En même temps, je fais peu de cas de ma propre personne. Que suis-je, comparé à ces héros de tous les jours ?

Madame Vernet n’est pas moins troublée, et déraisonne avec plus de bruit.

MADAME VERNET

Avouez qu’au point de vue artiste, un marin nous intéresse plus qu’un paysan.

HENRI

Celui-ci courbe le front vers la terre ; celui-là regarde au loin ou lève les yeux au ciel.

MADAME VERNET

Le marin pêche surtout la nuit. Il met dix