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plus qu’une goutte pour mettre dans notre soupe ce soir. Les vaches ne sont pas tirées. »

— « Tirez-les. Nous attendrons en mangeant une omelette ! »

— « Alors il faut que vous attendiez aussi que les poules aient pondu. J’ons vendu tous nos œufs au marché, hier. »

Je promène sur l’assistance un regard découragé.

— « Ce n’est pas la peine de venir à la campagne pour faire comme dans les villes. Soit ! Tordez-nous donc le cou à un lapin ! »

— « Un lapin ? mais, mon bon Monsieur, j’ons point de lapins. Qu’est-ce que j’en ferions donc ? Un lapin, ça mange comme une vache ; et qué que ça se vend ? Rien du tout. »

— « À votre tour », dis-je à Madame Vernet, en me rasseyant.

Elle s’y prend mieux que moi, car, pour obtenir de la brave femme quelque chose à manger, elle l’interroge sur ses travaux, ses habitudes, son mode d’existence, et complimente sa bonne mine, sa corpulence.

— « Que vous devez sans aucun doute à l’air pur des champs ! »