Tu me chasses ?
N’approchez pas !
Je t’ai obéi. Je serai à toi, toute à toi !
Oui, c’est un cauchemar abominable. (Mais il recule encore :) Grâce ! Va-t’en ! Grâce !
Es-tu coupable de quelque chose ?
Oui !… Par pitié, laisse-moi… laisse-moi !
Je t’appartiens, comme tu le voulais.
N’approchez pas !
L’amour doit survivre à tout, même à la mort !
Je vous ordonne de retourner là-bas…
On ne commande pas aux morts. On leur obéit.
Oh ! je me délivrerai de ce cauchemar ! Car c’est, c’est un cauchemar, une folie de mon cerveau !…
Tu ne peux plus rien contre moi : je suis morte.
Mais je puis vous échapper, moi ! moi qui suis vivant !
Toi, m’échapper ? Tu ne pourras pas. Je vais vers toi... Je vais vers toi...
(Robert, fou d’épouvante, recule encore devant l’irréelle visiteuse. Il heurte la petite table, tombe au pied du divan et entraîne dans sa chute la lampe, qui s’éteint. Ténèbres, où les lueurs du feu ne jettent qu’un rougeoiement.)
Ah ! non ! Pas cela !
Je vais vers toi !
(À ce moment, dans l’obscurité, les spectateurs distinguent, à leur tour, la vision qui est apparue à Robert : la morte hideuse qui, penchée vers lui, le touche déjà de ses mains décharnées.)
Non ! Pas cela ! Pas cela ! Laissez-moi ! Aaaah ! Non ! Pas cela !
(Il se tire un coup de revolver au cœur. Pendant qu’il expire, la vision s’efface avec la pensée qui l’a enfantée. On entend, par la fenêtre, les rires et les chants du Carnaval.)