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joue avec elle à quatre coins, et quand tu l’auras saisie, entre deux bonds, sur une feuille de luzerne, observe sa bouche : par ses terribles mandibules, elle sécrète une mousse noire comme du jus de tabac.

Mais déjà tu ne la tiens plus. Sa rage de sauter la reprend. Le monstre vert t’échappe d’un brusque effort et, fragile, démontable, te laisse une petite cuisse dans la main.


LE GRILLON

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C’est l’heure où, las d’errer, l’insecte nègre revient de promenade et répare avec soin le désordre de son domaine.



D’abord il ratisse ses étroites allées de sable.

Il fait du bran de scie qu’il écarte au seuil de sa retraite.

Il lime la racine de cette grande herbe propre à le harceler.

Il se repose.

Puis il remonte sa minuscule montre.

A-t-il fini ? Est-elle cassée ? Il se repose encore un peu.

Il rentre chez lui et ferme sa porte.

Longtemps il tourne sa clé dans la serrure délicate.

Et il écoute :

Point d’alarme dehors.

Mais il ne se trouve pas en sûreté.

Et comme par une chaînette dont la poulie grince, il descend jusqu’au fond de la terre.

On n’entend plus rien.

Dans la campagne muette, les peupliers se dressent comme des doigts en l’air et désignent la lune.


LE CAFARD

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Noir et collé comme un trou de serrure.




LE VER LUISANT

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I

Que se passe-t-il ? Neuf heures du soir et il y a encore de la lumière chez lui.

II

Cette goutte de lune dans l’herbe !