Page:Renard - Fantômes et fantoches, 1905.djvu/55

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
39
le lapidaire

ceptible, et réprimait à grand’peine ses frissons qui faisaient trembler sourdement le vantail.

Malgré toute son attention, tendue à l’extrême, il distinguait seulement des bruits incertains et rares, et parfois il lui était malaisé de les discerner dans le fourmillement du silence. Il eût voulu faire passer toutes les forces de la vie à son oreille et donner à l’ouïe toute l’activité des autres sens ; sa volonté impuissante s’exaspérait, et son désir d’entendre devint si impérieux qu’il perçut dans le repos universel des bruits fantômes, de même que ses yeux eussent vu des formes spectres au sein des ténèbres désertes.

Dès lors la réalité et l’hallucination se confondirent, la lassitude croissante augmenta cette confusion d’heure en heure, de nuit en nuit, de semaine en semaine, et Smaragd, à bout de force après tant d’immobiles insomnies, découragé, sentant son ardeur tomber devant un remords tardif depuis qu’Hermann, au sortir du laboratoire, avait failli découvrir sa faction somnolente, abandonna la partie et s’en fut derechef ronfler du crépuscule naissant à la fin de l’aube.

Il se contenta d’observer la chambre en y mettant l’ordre quotidien, et les mille objets de toute sorte ne lui apprirent rien de nouveau.

Cependant, le lapidaire persévérait dans son