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fantômes et fantoches

étaient inoubliables. Comme il avait dû peiner, le pauvre maître chancelant, pour changer en flammes dans cette chambre de veille les gemmes qu’il avait apportées troubles telles que du verre ou bien obscures comme des cailloux !…

Et le valet se plaisait à revoir par le souvenir la forme première des pierres aujourd’hui parfaites de symétrie et parvenues au paroxysme de leur scintillement grâce à toutes ces nuits blanches.

Il voulut alors évoquer l’apparence primitive des rubis et, soudain, une idée essentielle se déploya dans son esprit, si brusque, si énorme, qu’il crut sa tête trop étroite pour contenir une pareille explosion : les rubis étaient sortis de la chambre sans y être jamais entrés. Puis, ayant tout de suite aperçu, comme de loin, cette conclusion sensationnelle, sa pensée machinale se mit à gravir les derniers échelons de raisonnement qu’il lui restait à franchir pour arriver logiquement à cette étrange solution :

Smaragd avait ignoré l’existence de chacun des rubis jusqu’à ce que Hermann, après de longues détentions justifiées en partie par la délicatesse de leur taille, les eût exhibés un par un et d’année en année, tels qu’ils reposaient actuellement sur le velours vert.

Mais pourquoi eût-il caché ces joyaux, contre sa