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le lapidaire

problème insoluble à des énigmes encore plus indéchiffrables.

La difficulté de ces perquisitions s’aggravait d’ailleurs de ce qu’il en ignorait le but précis. Persuadé de faire d’importantes trouvailles, il n’aurait pu dire leur nature, et ce niais, acharné à la poursuite de découvertes chimériques, accomplissait un exploit d’apparence tellement stupide qu’on aurait pu se demander s’il n’y avait pas là quelque chose de fatal.

N’ayant pas réussi dans ses investigations, il résolut de surveiller les agissements de son maître lorsque celui-ci s’enfermait dans la chambre. Hermann y travaillait presque toujours le soir, après son retour de la maison Spirocelli, et son labeur se prolongeait parfois fort avant dans la nuit. Bien souvent, Smaragd avait entendu le grincement du diamant sur le diamant, des bruits de bouteilles remuées, et la respiration essoufflée du lapidaire qui, se faisant très vieux, geignait à la tâche, certaines nuits de fatigue. Il était même arrivé qu’il ne quittât sa besogne qu’au matin, livide, avec les pommettes rouges et l’œil creux, mais alors, il venait d’achever la taille de quelque joyau favori, et c’est aux clartés de l’aurore que les rubis géants avaient presque tous essayé leurs facettes neuves.

Smaragd s’en souvenait bien. Ces aubes-là