Page:Renard - Fantômes et fantoches, 1905.djvu/286

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
270
fantômes et fantoches

me faufiler à travers ces forêts ? Mais nous aurions été les pucerons de ces fougères-là !

Il était lancé. Je me plaisais infiniment à l’écouter parler, de sorte que nous ne pensâmes plus aux sauterelles.

Ces insectes poursuivirent leurs méfaits avec une régularité désespérante et une méthode bizarre.

En dix nuits autant de catalpas furent privés de leurs feuilles basses, mais, à chaque fois, le sinistre s’étendait un peu plus haut, et le onzième arbre — ils étaient à peu près de niveau — fut entièrement dépouillé.

Intrigué par ces faits, Gambertin se décida enfin à traverser la pelouse roussie pour venir les constater.

Après quelques minutes de réflexion :

— Ce doit être, dit-il, une espèce de criquets venus d’Afrique avec le siroco. Les petites nervures latérales sont mangées, c’est drôle… et puis ces touffes qu’elles ont laissées et qu’elles ne laissent plus… et puis ces agissements nocturnes… Il faut en avoir le cœur net, Dupont, cette nuit nous nous embusquerons pour être fixés là-dessus.

Je n’osai pas refuser ; mais, à mon avis, les Ormes étaient trop souvent le théâtre de scènes