Page:Renard - Fantômes et fantoches, 1905.djvu/284

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
268
fantômes et fantoches

soucieux. J’étais maintenant familiarisé avec son idiome et je traduis :

— Monsieur, dit-il à Gambertin, le malheur est complet… voilà que nous avons les sauterelles à cette heure…

Il serrait les dents :

— Ah ! les voleuses, elles m’ont rongé mon plus beau catalpa !

— Allez voir ça, si tel est votre plaisir, Dupont, pour moi, je reste au frais, dit mon hôte.

Le moindre détail de la vie rustique a de l’attrait pour un citadin. Je suivis Thomas.

L’arbre, de sa frondaison luxuriante, ne gardait qu’un bouquet de feuilles, les plus hautes. Des autres, on voyait encore la nervure principale pointant comme un poil vert pitoyable. Les branches ressemblaient à des arêtes de poisson.

— Pourquoi qu’elles en ont laissé, répétait Didyme, les chiennes, mais pourquoi donc qu’elles n’ont pas tout dévoré, les bougresses…

Le désastre ne présentait rien qui pût me retenir longtemps. Je rentrai.

— Eh bien ? fit Gambertin.

— Eh bien, répondis-je, le parc est une étuve, mais quel spectacle superbe, cet azur d’orient, cet air qui vous caresse comme une créature enfié-