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offrande à cypris porte-miroir

deviner pourquoi, s’effaça devant le coiffeur et sortit après lui.

Le compositeur s’était gravement endetté.

La salle, toute vivante de fleurs, semblait énorme. De l’orchestre au paradis, une végétation précieuse l’envahissait. Point de guirlandes et point d’ordre ; chaque place : un bouquet, chaque étage : un bosquet. Babylone n’avait point de jardins suspendus aussi follement somptueux.

Au milieu de ce gouffre coquet, dans un éblouissement de lumière, les parfums, chansons des corolles symphonisaient : lilas et cyclamens, languide berceuse des cordes ; appels brutaux des mimosas, fanfare de cuivres ; cantilène flûtée des roses ; bouffée de lis, violente comme un choc de cymbales.

À leur poste invisible, les musiciens attendaient, de même les fleurs, et de même la lumière.

Mme de Fryvol apparut sous un berceau de lilas blancs au centre des balcons : sa loge.

Ses yeux émerveillés s’emplirent de toute cette joie éclose pour eux seuls, elle crut distinguer la danse de leurs paillettes d’or ; et un instant, elle resta debout en face du Prodige, encore diminuée par Sa grandeur, menue et voluptueuse, comme Phryné au bord de la mer chatoyante.