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offrande à cypris porte-miroir

Quant à Lavaret, ses voyages d’inspiration le maintiennent sans cesse dans un exil lucratif, et ses portraits sont trompeurs. Le flattent-ils donc outre mesure ?

Non. Mais, en effigie, nul n’est petit, Photographies, toiles, statues représentent toutes des individus de dimensions honorables. Lavaret, vexé de sa brièveté, a trouvé le moyen de perfectionner encore ce trompe-l’œil à son profit : dans la plupart de ses images, on ne voit de lui que la figure, à peine un buste, mais, s’il pose l’ensemble, il triche et s’environne d’objets plus menus que nature afin d’être grandi par proportion. En réalité, le Lavaret jouant de l’alto de Carolus Duran est un Lavaret jouant du violon, et même d’un violon trois quarts.

Ainsi, pour des causes diverses, Briffaut et Lavaret, qui eussent été comblés d’égards le jour du vernissage ou même un vendredi, ayant à dessein choisi cette matinée dominicale, passaient dans l’inattention unanime.

Briffaut monologuait. Était-ce le plaisir d’une heure de congé ? La joie si rare de parler à ce vieux vagabond de camarade ? Le carabin qui survit en tout thérapeute donnait libre cours à sa verve mi-