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offrande à cypris porte-miroir

des bostonneurs ; c’est une collection de précieuses marionnettes aux attitudes souples, au geste adroit parmi l’envolée bruissante du satin, c’est une série de fins croquis dont chacun voudrait l’esprit d’une légende, et que Mme de Fryvol retrouve dans les albums des caricaturistes en vogue lorsqu’elle en feuillette les miroirs.

Parmi tous les Conseillers des Grâces, le favori de Mme de Fryvol n’est pas, comme on pourrait le croire, celui de la coiffeuse en citronnier. Il est pourtant, celui-là, dépositaire de secrets bien importants : il sait la composition mystérieuse des poudres diversement nuancées dont Mme de Fryvol fait usage pour conserver le même teint malgré les couleurs différentes de ses robes. Telle toilette exige un nuage rose, et telle autre ce brouillard ambré. Il connaît aussi, le miroir de la coiffeuse, les sourcils arqués de noir et la bouche exaltée d’un as de cœur… « Fi, madame ! » dirait le Conseiller des Grâces, s’il parlait de sa petite voix drôle et cristalline.

Et le peintre gourmandé lui répondrait, inconscient écho d’un convive paradoxal :

— Bah ! Tout n’est qu’apparence ! Pour le plaisir de la vue, il sied que chacun s’efforce d’orner le décor, de faire paraître belle la médiocrité, et d’embellir la beauté d’une illusion de plus. Les